27 févr. 2018
Intérêt agronomique, nutritionnel, environnemental : le potentiel du chanvre
Pour quelles raisons connaissez-vous le chanvre ? Plus certainement pour ses applications dans le domaine du textile que de l’alimentation... Et pourtant ! Cette plante ancestrale présente des atouts considérables à différents niveaux pour le domaine agroalimentaire : intérêt agronomique, intérêt environnemental, et intérêt nutritionnel. S’il est utopiste d’imaginer que la production de chanvre bondisse dans les années à venir, il faut s’attendre à voir son retour dans les champs… et dans les assiettes, sous différentes formes. Explications de Rémi Saurel, professeur à AgroSup Dijon et chercheur dans l’UMR PAM.
Intérêt agronomique et environnemental
Cultivé depuis des siècles en France pour ses fibres (industrie du textile, papier…) (GeoChanvre, nouvellement recrutée par ToasterLAB, vous en parlerait mieux que moi) le chanvre industriel (Cannabis sativa L) est une culture en renaissance en France et dans le monde, notamment grâce à son fort intérêt agricole et environnemental.
« La plante du chanvre nécessite très peu, voire pas du tout, d’irrigation. En plus, grâce aux substances antimicrobiennes naturelles qu’elle contient, elle n’a pas besoin de traitement phytosanitaire. Elle fixe le carbone (environ un hectare de culture fixe une tonne de carbone atmosphérique). Résistante, très adaptable à différents types de sols, et avec une croissance rapide, elle est très intéressante pour assainir les sols et limiter l’apparition de mauvaises herbes sans avoir recours à des traitements phytosanitaires : un vrai atout pour l’agriculture, notamment pour l’agriculture biologique », détaille Rémi Saurel. « On constate d’ailleurs une hausse des demandes en chanvre par les agences de l’eau pour protéger les Aires d’Alimentations en eau Potable », ajoute-t-il.
« Le chanvre est également très intéressant dans une démarche de bioéconomie ou bio-raffinerie, puisque toute la plante s’utilise et est valorisable (tige, feuille, fleurs, bourgeons, graines…) », ajoute-t-il.
En Europe, la France se classe d’ailleurs comme le premier producteur de chanvre industriel, avec environ 12 000 hectares de production en 2016 (contre 8 000 en 2006) (la Chine est le 1er producteur au niveau mondial, représentant plus de la moitié des récoltes légales* à travers le monde).
*Appartenant à la même famille que le cannabis, bien que ne contenant pas de substance psychotrope, le chanvre reste soumis à des contraintes législatives. Certains pays n’autorisent pas la culture ou la commercialisation de produits à base de chanvre, comme encore le Japon.
Intérêt nutritionnel
« Le chanvre est une plante encore sous-exploitée, mais qui présente de nombreux débouchés, notamment en valorisant sa graine. C’est d’ailleurs parce que la graine de chanvre est très riche en protéines que nous nous y sommes intéressés il y a un an et demi », m’explique Rémi Saurel, qui a initié avec Vitagora un projet de R&D sur le chanvre.
La graine de chanvre (également appelée chènevis) contient en effet :
- 25% de protéines, avec la présence des 8 acides aminés essentiels
- Plus de 30% de matière grasse avec un équilibre oméga3 et oméga6 optimal pour la santé humaine et animale (le ratio oméga6/oméga3 est inférieur à 3, les recommandations de l’ANSES préconisant un ratio inférieur à 4)
- 30% de glucides dont 80% sont des fibres insolubles (favorisent le transit et la satiété)
- Elle est également source de vitamines B1, B2, B3, B6 et contient de nombreux minéraux tels que phosphore, potassium, magnésium, calcium, fer, manganèse, zinc, sodium, silicium, et chrome.
Autre particularité : sa forte digestibilité, et son absence totale d’allergènes (la graine de chanvre peut donc être incorporée à des aliments sans gluten par exemple - lire ici notre article sur le marché du sans gluten).
« Sans compter ses vertus médicinales et stimulantes, sans effet de dépendance ! » ajoute Rémi Saurel.
Quels débouchés alimentaires ?
Si la production française de chanvre et ses utilisations en alimentation restent confidentielles voire artisanales, les débouchés sont multiples :
- en graines décortiquées (les « amandes » de chanvre), à intégrer à des céréales, des barres, ou dans les produits de panification, au même titre que les graines de lin par exemple
- l’huile, déjà très demandée par la cosmétique pour ses vertus antioxydantes (comme l’huile d’argan), est aussi comestible
- le « jus » de chanvre, présente des propriétés complémentaires aux laits de soja ou de riz. Bjorg propose d’ailleurs une boisson végétale riz/chanvre, et Triballat (Sojasun) commercialise des desserts à base de graines de chanvre (exemple ici). Une valorisation très intéressante lorsque l’on sait que le marché des boissons végétales représente 12% des parts du marché du lait et devrait connaître un taux de croissance annuel moyen de 10% sur la période 2015 – 2020.
- les tourteaux de presse, déjà valorisables en alimentation animale, pourraient être exploités pour l’obtention de concentras protéiques tournés vers l’alimentation humaine
Quid de l’acceptation organoleptique par les consommateurs ? « Le chanvre présente un goût assez prononcé, plutôt herbeux », conclut Rémi Saurel. « Les consommateurs n’y sont pas encore habitués, mais ses arômes méritent que l’on s’y intéresse et qu’on le valorise. » Et pourquoi ne pas jouer sur ces arômes à l’aide de la fermentation (relire ici notre compte-rendu du Vitagora Café « Les microflores, atout arômes, sécurité et fonction santé des produits agroalimentaires » ) ? D’ores et déjà, des sociétés, comme au Canada, produisent des produits fermentés à base de chènevis, tel que du tofu.
Pour aller plus loin
Que ce soit pour la qualité du sol de vos cultures agricoles, pour l’alimentation animale, ou, plus récemment, pour l’alimentation humaine, vous vous intéressez au chanvre ? Nous aussi ! Contactez-moi pour que l’on évoque ensemble des éventuelles collaborations : eva.chance@vitagora.com.
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