15 oct. 2019
Bioéconomie : quand le renouvelable est source de valeur
Manger dans des assiettes en bambou, jouer au tennis avec des raquettes en fibres de lin, se déplacer grâce à des biocarburants, savourer des crackers élaborés à partir de drèches de brasserie… peut-être avez-vous déjà sans le savoir utilisé ou consommé un produit biosourcé et donc issu de la bioéconomie.
Pratique économique basée sur l’utilisation et la valorisation des ressources renouvelables, la bioéconomie constitue une des réponses aux enjeux environnementaux et sociétaux actuels.
Quelles sont les ambitions de la bioéconomie ? Quels secteurs d’activités sont concernés ? Pourquoi les industriels de l’agroalimentaire doivent-ils s’y intéresser ?
Eclairages avec Grégoire Burgé, Adjoint au Directeur de la Recherche et de la Valorisation et chargé de mission bioéconomie à AgroParisTech - Institut des sciences et industries du vivant et de l'environnement.
La bioéconomie : objectif, renouvelable
Si le terme de bioéconomie ne nous est pas inconnu, il n’est pas toujours évident de l’expliquer tant il est riche de sens. Grégoire le définit ainsi : « la bioéconomie regroupe l’ensemble des activités liées à la production, à la transformation et à la valorisation des ressources vivantes (végétales ou animales) issues de l’agriculture, de l’aquaculture et de l’exploitation forestière dans différents secteurs d’activité. Il s’agit de créer de la valeur ajoutée en substituant une partie du carbone fossile par du carbone renouvelable. » Il insiste sur l’importance de ce dernier point : « l’utilisation et la valorisation des ressources biosourcées renouvelables en lieu et place des ressources pétrosourcées sont un des aspects fondamentaux de la bioéconomie. »
La bioéconomie concerne de nombreux secteurs d’activité : « la bioéconomie a pour finalité l’alimentation humaine et animale, ainsi que la production de biomatériaux, de biocarburants/bioénergies et de biomolécules », précise Grégoire. Dans l’agroalimentaire, cela se traduit notamment par la valorisation de co-produits pour l’alimentation animale et humaine. Par exemple, la société NBread, accélérée par ToasterLAB, a mis au point un procédé pour transformer les co-produits issus de la production agroalimentaire (fruits, légumes…) en une matrice alimentaire dont la texture est proche du pain de mie.
Une réponse à des enjeux stratégiques à faire connaitre aux consommateurs
Sujet d’intérêt et d’actualité, la bioéconomie est au cœur des préoccupations du Ministère de l’agriculture et de l’alimentation qui a lancé le plan d’actions 2018-2020 « Une stratégie bioéconomie pour la France » pour en promouvoir les principes et les avantages auprès des agriculteurs, des industriels et du grand public. Grégoire nous explique cet engouement : « la bioéconomie apparaît comme une des solutions pour répondre à des enjeux environnementaux et sociétaux importants tels que diminuer l’utilisation de ressources fossiles, limiter le gaspillage, gérer les ressources naturelles de manière responsable, améliorer l’attractivité des territoires et favoriser l’emploi ».
En France, le secteur de la bioéconomie représenterait environ 1,7 millions d’emplois et 316 milliards de chiffre d’affaires selon des chiffres avancés par le pôle de compétitivité IAR.
Pourtant, la notion de bioéconomie reste encore confidentielle auprès des consommateurs. « Engager des actions pédagogiques pour promouvoir la bioéconomie et ses produits, non seulement auprès des consommateurs, mais également dans le cadre des formations du secondaire et de l’enseignement supérieur, est un enjeu majeur », confirme Grégoire.
Ainsi, le plan d’actions de la stratégie bioéconomie prévoit des actions opérationnelles comme « la création d’un « label » bioéconomie qui pourra être apposé sur les produits respectant un cahier des charges précis avec notamment des critères environnementaux » nous confie Grégoire. De quoi mettre en avant le critère renouvelable de vos produits innovants. L’ambition du Ministère est d’aboutir à un label commun pour l’Union européenne.
Solutions durables, naturelles : industriels, pourquoi vous y intéresser ?
Prendre en compte le désamour des dérivés pétrochimiques
Interdiction des pailles, de la vaisselle jetable en plastique, des contenants alimentaires en polystyrène expansé… les récentes évolutions législatives visent à limiter la production et la consommation de matière plastique. En parallèle, la loi sur la transition énergétique et la croissance verte du 17 août 2015 encourage le recours aux produits biosourcés dans le cadre des marchés publics.
A l’origine de ces évolutions législatives, on trouve la motivation citoyenne de réduire la production de déchets en plastique. D’après une étude menée par TipaCorp, 89,3% des consommateurs interrogés se déclarent inquiets de l'impact global des emballages plastiques (retrouvez notre article de blog sur ce sujet ici).
« La recherche et l’innovation de la bioéconomie permettront de produire de manière durable des alternatives crédibles aux produits pétrosourcés comme le plastique ou de nombreuses molécules chimiques » insiste Grégoire. En témoignent les initiatives des sociétés Lactips et Géochanvre. La première produit un substitut aux films plastiques à partir de protéines de lait quand la seconde propose des paillages en chanvre biodégradables pour l’agriculture.
Une solution « clean label »
De plus en plus, les consommateurs en quête de naturalité se tournent vers des produits « clean label » (lire notre article sur le clean label ici). Pour remplacer les ingrédients artificiels, les produits issus de la bioéconomie sont une des sources naturelles vers laquelle les industries agroalimentaires peuvent se tourner.
Par exemple, alors que 99% des produits alimentaires qui intègrent une base fruits sont corrigés en arômes de synthèse ou naturels (car les fruits sont achetés non mûrs pour des raisons logistiques, et présentent donc de faibles réserves aromatiques), les acteurs du projet Natarome+, labellisé par Vitagora, a pour ambition de développer de nouveaux ingrédients « Clean Label » issus de la bioéconomie. Ceux-ci ne seront plus une simple base de fruits : ils intègreront également des fonctions technologiques apportées précédemment par les additifs (arômes, mais aussi texture et couleur). Une solution pour des produits finis sans arômes ni additifs ajoutés, fortement différenciants par rapport à la concurrence.
Pour aller plus loin
Si vous souhaitez aller plus loin sur le sujet, et engager votre entreprise dans une démarche durable, participez au workshop « écoconception » du 7 novembre prochain. Lors de cette journée, réservée exclusivement aux adhérents Vitagora, nous vous proposons de travailler concrètement sur les projets d’éco-conception de vos entreprises. Renseignements et inscription ici.
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Crédits photo : Géochanvre
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