02 avr. 2019
Brexit : quelles conséquences pour la filière agroalimentaire ?
Depuis que le Brexit a été voté en juin 2016, tous les pays de l’Union Européenne, Royaume-Uni inclus, restent dans l’expectative : comment se formalisera la sortie de nos voisins britanniques de l’UE ? Un accord sera-t-il trouvé ? Quelles seront les conséquences pour l’industrie agroalimentaire française ? Et surtout, quel impact sur les relations commerciales avec nos partenaires d’outre-Manche ?
Le 29 mars dernier, le parlement anglais a rejeté une 3ème fois l’accord trouvé entre le gouvernement de Theresa May et les autres états membres de l’UE. La date désormais fixée pour le Brexit est le 12 avril. Examinons alors les deux scenarios possibles : une sortie avec ou sans accord, les conséquences sur le secteur agroalimentaire et découvrons comment vous y préparer.
De bonnes relations de voisinage
Le Royaume-Uni est un partenaire commercial de 1er plan pour l’industrie agroalimentaire française, explique Claude Cochonneau, président des Chambres d’agriculture, à l’Usine Nouvelle : « celui-ci représente notre 3ème débouché pour nos exportations agroalimentaires. À l’inverse, la France est le 2ème plus important fournisseur de produits agroalimentaires du Royaume-Uni » (Source Usine Nouvelle).
Quelques secteurs agroalimentaires tirent particulièrement leur épingle du jeu des relations commerciales avec le Royaume-Uni. D’après les chiffres fournis par l’ANIA, la France exporte 4,55 milliards d’euros de produits agroalimentaires outre-Manche, dont 1,1 milliard d’euros de boissons alcoolisées, 570 millions d’euros de produits laitiers et 266 millions d’euros de produits d’épicerie (Source Process Alimentaire).
L’Union Européenne a largement favorisé les échanges entre Etats membres : union douanière, ouverture des frontières, libre-circulation des biens et des personnes, mise en place de normes sanitaires et de standards de qualité communs… Une sortie sans accord obligerait à renégocier les traités d’échanges avec Royaume-Uni.
Deal or no deal ?
La sortie du Royaume-Uni de l’Union Européenne doit normalement intervenir le 30 mars 2019. Deux scénarios sont possibles.
Une sortie avec accord
C’est l’option que tout le monde espère. Ce scénario prévoit une période de transition jusqu’en décembre 2020. Jusqu’à cette échéance, rien ne devrait changer :
- Les biens, les services, les capitaux et les ressortissants britanniques continuent d’être soumis aux droits et obligations réservés aux membres de l’UE. Même chose pour les entreprises. Les règles actuelles continueront d’être appliquées.
- L’accord de retrait garantit les droits acquis avant le retrait (validité des certificats, reconnaissance des qualifications, etc.) durant 21 mois.
- La politique agricole commune (PAC) et la politique commune de la pêche (PCP) s’appliquent au Royaume-Uni.
La période de transition doit permettre d’une part des négociations entre le Royaume-Uni et l’Europe et d’autre part aux citoyens et aux entreprises de se préparer aux changements.
Dans le cas où votre entreprise exporte des produits agroalimentaires vers le Royaume-Uni, pendant la période de transition, vous serez soumis aux mêmes règles que celles en vigueur actuellement, notamment pour le commerce. En revanche, des changements interviendront au 1er janvier 2021 et il faudra s’y préparer dès que possible. À cette date, les règles seront cadrées par un accord bilatéral sur la relation future entre le Royaume-Uni et l'UE et soumises au droit national britannique (source).
Une sortie sans accord
En cas de sortie sans accord, les choses se compliquent : le Royaume-Uni sera considéré par l’UE comme un pays tiers avec lequel aucun accord n’a été conclu.
En pratique, cela se traduira dès le 12 avril 2019 par :
- Le rétablissement des formalités douanières, des droits de douane / accises et de transit,
- Le rétablissement des formalités relevant du ministère de l’agriculture (contrôles sanitaires à l’import, certification sanitaire à l’export et certificats de capture),
- La fin de la libre circulation des capitaux, des marchandises, des services et des personnes (travailleurs, étudiants, voyageurs) ainsi que la fin de la liberté d’établissement,
- Le rétablissement automatique de certaines barrières réglementaires à l’export ou à l’import.
Si votre entreprise exporte des produits agroalimentaires vers le Royaume-Uni, vous serez soumis aux règles par défaut du commerce international (Organisation mondiale du commerce), rétablies dès le 12 avril 2019.
Comment s’y préparer ?
Pour bien se préparer aux conséquences du Brexit, il faut évaluer la situation et mettre en œuvre dès que possible des mesures d’anticipation : impacts sur les salariés (déplacement, sécurité sociale, assurance maladie…), sur la chaîne logistique (biens et services, produits soumis aux droits d’accises, animaux vivants) et sur les flux frontaliers.
Quelques conseils :
- Identifiez tous les secteurs concernés par votre activité : juridique, RH, fournisseurs/distributeurs, etc. ;
- Accompagnez vos salariés français ou britanniques dans leur démarches administratives ;
- Renseignez-vous sur les contrôles, sanitaires notamment, sur vos flux commerciaux avec le Royaume-Uni et prévoyez bien de les intégrer dans vos processus ;
- Diminuez le temps de transit à la frontière britannique en accomplissant les formalités douanières sur le territoire français ou dans un pays membres de l’UE pour les marchandises à l’export. À la frontière, il restera la formalité ECS (Export Control System) à accomplir et un document à faire viser par les services des douanes (source : Classe export n°248, janvier/février 2019) ;
- Anticipez le circuit de recouvrement de la TVA : après le Brexit, ce sont les douanes qui seront compétentes pour la TVA import ;
- Digitalisez votre chaîne d’approvisionnement et tous vos documents pour réduire le temps consacré aux formalités administratives dues au Brexit ;
- Déposez vos titres de propriété intellectuels européens au Royaume-Uni, par prudence.
Pour en savoir plus
En l’absence d’accord signé, c’est la prudence qui doit s’imposer dans vos relations commerciales avec le Royaume-Uni. N’hésitez pas à vous rapprocher des organismes officiels pour obtenir des informations et à prendre conseil auprès d’experts :
- Ministère de l’agriculture
- Ministère de l’économie
- Les douanes
- Le site dédié sur le Brexit mis en place par l’Etat
- Le ministère de l’Europe et des affaires étrangères
Pour aller plus loin
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