07 sept. 2022
Lin, chanvre… un potentiel à (re)découvrir en agroalimentaire
Le lin et le chanvre : deux cultures pour lesquelles la France se distingue… mais pas toujours à destination du secteur agricole ou agroalimentaire !
Ces plantes cultivées depuis la nuit des temps, apportées en Europe par les Phéniciens et Égyptiens, représentent des atouts agronomiques, environnementaux, mais aussi nutritionnels à (re)découvrir. Alimentation animale, assainissement des sols et des eaux, produits alimentaires à haute valeur ajoutée : redécouvrez le potentiel du lin oléagineux et du chanvre ci-dessous.
Le lin : un oléagineux en redéploiement
Si la France est le leader mondial de la production du lin fibre, destiné à l’industrie du textile, avec 121 569 ha en 2020 et une croissance de 130% en 10 ans (source : Le lin normand prépare son avenir malgré la crise - Le Parisien), le lin oléagineux (lin d’hiver ou lin de printemps), destiné à l’alimentaire, reste discret dans l’Hexagone, avec seulement 5% de la production mondiale.
Loin derrière la Russie, le Canada, le Kazakhstan, et la Chine, la France représente, en 2021, 30 000 ha de production de lin oléagineux : ce qui permet une collecte de 60 000 tonnes selon Alliance Linoléa, la filière dédiée au lin oléagineux… une production limitée, mais qui s’est pourtant fortement développée ces dernières années devant l’intérêt des marchés face aux qualités nutritionnelles, technologiques et environnementales de cet oléagineux (source). « La demande en graine augmente », expliquaient les représentants d’Alliance Linoléa à La France Agricole en janvier 2022 : d’où la volonté de la filière agricole de passer à 50 000 hectares dédiés au lin oléagineux d’ici 2024.
Le chanvre : la France, leader européen
Le chanvre fut l’une des premières plantes cultivées par l’Homme : à la fois pour ses fibres, pour ses graines nourrissantes, et ses bienfaits médicinaux. La France est historiquement un pays très fortement producteur de chanvre, dont l’apogée se situe au début du 19e siècle avec plus de 175 000 ha dédiés. Si la surface de production française de chanvre a drastiquement baissé dans les années 1960 (avec seulement 700 ha), elle n’a pas disparu : la France s’est ainsi distinguée comme le seul pays à ne pas avoir supprimé totalement la culture du chanvre devant l’arrivée de la pétrochimie et des textiles synthétiques.
Aujourd’hui, la surface de chanvre cultivée retrouve un niveau intéressant avec 21 700 ha de chanvre cultivé en 2020, ce qui permet à la France de conserver sa place de leader en Europe. A noter qu’à l’international, le chanvre représente un total de 221 560 ha cultivés, avec en tête la Chine (65 400 ha) suivie de l’Europe (54 481) (source : Interchanvre - La culture, 2020).
Des débouchés pour une agriculture plus durable
Les bienfaits du lin oléagineux pour l’environnement sont multiples. En tant que plante au système racinaire pivotant, le lin oléagineux permet de restructurer les sols agricoles. Peu demandeuse en intrants et fertilisants, c’est une plante résistante aux maladies et aux insectes. Si la culture du lin oléagineux est encore plutôt jeune, la recherche variétale actuelle permet de proposer des variétés à fort rendement (+20% de rendement avec les nouvelles variétés par rapport aux années 2000), et résistantes aux maladies pour pouvoir se passer de produits phytosanitaires (source : Lin oléagineux | CAPL). En tant qu’aliment animal, le lin oléagineux permet aux bovins qui en consomment de rejeter moins de méthane dans l’atmosphère : un moyen habile pour les éleveurs cherchant à réduire leur empreinte carbone.
Du côté du chanvre, les atouts agronomiques sont également remarquables. Le chanvre est une plante hautement performante pour les exploitations agricoles. Très bonne tête de rotation, peu coûteuse, la culture du chanvre fertilise les cultures suivantes et favorise les rendements de la céréale suivante. Il ne nécessite ni herbicide, ni fongicide, ni insecticide… et une très faible irrigation ! C’est également un excellent moyen pour limiter la pousse de mauvaises herbes, grâce à une densité élevée et une forte vitesse de croissance, ou contre les ravageurs de cultures, puisqu’il est très apprécié de leurs prédateurs, comme les araignées et les carabidés. Véritable pompe à nitrate, à métaux lourds et à carbone atmosphérique, le chanvre est un très bon assainisseur des sols et de l’air : environ un hectare de culture permet de fixer une tonne de carbone atmosphérique.
Nutrition animale et humaine : des applications à explorer
En tant qu’ingrédients alimentaires, le lin oléagineux et le chanvre méritent largement que je vous en parle.
Du côté du lin, c’est à l’alimentation animale que je pense évidemment en premier : leur teneur en acides gras oméga-3, qui est la meilleure connue parmi les sources végétales !, permet de réduire les risques de maladies cardio-vasculaires chez l’humain qui consomme des produits (lait, beurre, viande…) issus d’élevages enrichis en lin. Si 85% des débouchés du lin oléagineux restent l’alimentation animale, sous la forme de tourteaux de lin extrudé, l’alimentation humaine progresse également (Lin oléagineux | CAPL). En plus de sa teneur exceptionnelle en acides gras, le lin est riche en protéines, en fer, en fibres, en polysaccharides et en acide alpha-linolénique : c’est un ingrédient candidat excellent pour l’obtention d’une allégation nutritionnelle ! Utilisé pour obtenir de la farine pour pains spéciaux (5 à 6% de ses débouchés), mais encore en huile, consommé en graines, ou en compléments alimentaires, il est apprécié des personnes diabétiques, pour réguler la pression artérielle ou maintenir un bon taux de cholestérol.
La graine de chanvre (ou « chènevis »), si elle est encore peu connue, est également un vrai trésor nutritionnel. Elle contient en effet 25% de protéines, avec la présence des 8 acides aminés essentiels, plus de 30% de matière grasse avec un équilibre oméga-3 et oméga-6 optimal pour la santé humaine et animale (une cuillère à soupe d’huile de chanvre comble ainsi 85% des besoins journaliers en acides gras essentiels), 30% de glucides dont 80% sont des fibres insolubles pour favoriser le transit et la satiété, et contient de nombreuses vitamines (B1, B2, B3, B6) et minéraux (phosphore, potassium, magnésium, calcium, fer, manganèse, zinc, sodium, silicium, et chrome).
Si le chanvre est surtout regardé pour le CBD (lire également notre dossier Observatoire des tendances #23 - Chanvre : un potentiel à (re)découvrir en IAA (vitagora.com) ici – réservé aux adhérents : se connecter à son espace), plusieurs débouchés alimentaires sont amenés à se développer : tourteaux de presse pour l’alimentation animale, et pour l’alimentation humaine, graines décortiquées à intégrer à des céréales, des barres, ou du pain, huile, « jus » de chanvre, qui présente des propriétés complémentaires aux laits de soja ou de riz… A noter qu’en France, les produits vendus en magasins bio et contenant du chanvre industriel enregistraient un chiffre d’affaires de 3,48 millions d’euros en 2016 – un chiffre en hausse de 8,17% en 2017 (source : Interchanvre - Documents de référence).
Pour aller plus loin
Pour aller plus loin sur le sujet du chanvre, lire l’Observatoire des tendances #23 - Chanvre : un potentiel à (re)découvrir en IAA (vitagora.com) (accès réservé aux adhérents de Vitagora). Et pour réaliser une veille régulière et identifier des solutions innovantes, abonnez-vous à notre blog (environ 2 à 3 articles par mois) !
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