Observatoire des Tendances #24, INTRODUCTION : Covid-19 et enjeux agroalimentaires

Covid-19 et marché agroalimentaire : quel impact, quels enjeux ?

Ce numéro de l’Observatoire des Tendances a été rédigé en septembre 2020 et ne saurait tenir compte de l’évolution de la situation à une date ultérieure. 

Introduction  

La covid-19, un game changer* ?

1^er Janvier 2020 : alors que 400 000 personnes célébraient la nouvelle année sur les Champs Elysées, personne en France n’anticipait la crise sanitaire qui se profilait. A l’autre bout du monde, en Chine, une infection virale inconnue jusqu’alors, et présentant des symptômes de pneumonie, avait fait son apparition depuis quelques mois. Si l’on entendait alors parler de « coronavirus », la menace ne semblait pas réelle, trop éloignée de nous et abstraite.

Mi-mars 2020, la situation s’est renversée : le terme de « pandémie » est lancé, et l'Europe serait devenue l'un des principaux foyers de contamination. Deux types de comportements principaux se distinguent en France. D’un côté, des consommateurs pris par la panique, se ruant sur les rayons des supermarchés, craignant que l’on connaisse le même sort que nos voisins italiens confinés depuis début mars. D’un autre côté, des consommateurs détachés, peinant à y croire, par scepticisme, sentiment d’intouchabilité, ou indifférence.

Puis, vint, en seulement 72h après annonce, la fermeture de « tous les lieux publics non indispensables à la vie du pays », dont les écoles. Et dès le lendemain, l’interdiction de déplacement, résumée dans l’usage par l’expression de « confinement national » - à la durée indéterminée. Brutalement, pour ce qui aura finalement duré 55 jours, les Français ont fait face à un bouleversement complet de leurs repères. Ils ont dû repenser leur façon de travailler, d’échanger, d’éduquer les enfants, de consommer, de se nourrir… De même pour les entreprises, avec, en plus, des fermetures de frontière et des contraintes inédites en terme de commerce extérieur et de circuits de distribution. La crise sanitaire, devant l’ampleur des dégâts et des risques associés, se transforme en une triple crise : également économique et sociétale.

Six mois plus tard, et alors que la situation sanitaire demeure préoccupante, tant au niveau international (et notamment dans les pays d’Amérique du Sud et aux Etats-Unis) que local, il reste extrêmement difficile de tracer les hypothèses du « monde d’après » - à supposer même que ce concept puisse revêtir une quelconque réalité. Pour autant, il est important d’observer et d’analyser les changements qui se sont opérés, ou s’opèrent encore – et d’essayer d’en anticiper leur pérennité.  

* Expression d’origine américaine, notamment utilisée dans un contexte politique et médiatique, pour caractériser un élément ou événement qui « change la donne » de façon significative

Doit-on s’attendre à un « monde d’après » ?

On serait vite tenté d’aller à la simplification : il existerait un « monde d’avant la crise », et, sur la base des dangers et opportunités qu’elle représente, un « monde d’après », une sorte d’« autre côté du miroir », avec la résolution des problèmes actuels.

C’est sans compter les continuités et les interférences qui existent entre ces deux « mondes ». Car il n’y a pas deux entités, l’une « avant » et l’autre « après » – les fantasmes de dystopies se cantonnent bel et à bien toujours à la fiction. En revanche, il y a une suite d’événements qui interagissent entre eux et provoquent des évolutions plus ou moins continues. Si les game changers, telle que la crise sanitaire mondiale actuelle, modifient certaines trajectoires et accélèrent d’autres tendances, ils le font bel et bien sur le socle de l’existant. Les motivations des consommateurs que nous allons voir ne sont pas nouvelles. Elles s’exprimaient déjà depuis plusieurs années. La crise de la covid-19 et le confinement imposé dans de nombreux pays à travers le monde les ont fait surgir – ils ne les ont pas créées.

« En chinois, le mot crise est formé de deux caractères. L'un représente le danger. L'autre l'opportunité », évoquait John Fitzgerald Kennedy dans son discours à Indianapolis en avril 1959.

Quelles opportunités se cachent derrière cette crise sanitaire, économique et sociétale ? La covid-19 a-t-elle accéléré les tendances actuelles ? Dans un contexte de pandémie, qui n’est pas à l’abri de se reproduire dans les décennies à venir, comment se réinventer notamment dans la RHF et dans la distribution ? Quel impact au niveau de l’échiquier international dans l’agroalimentaire ?

Un numéro consacré

Pour approfondir ces questions et explorer de près cette situation inédite, nous avons choisi d’y consacrer un numéro entier de l’Observatoire des Tendances, en résonnance avec les conférences de notre événement Appetite for Innovation d’octobre (programme et inscription sur ce lien). Une série de 4 articles va vous être proposée (exclusivité adhérents - se connecter) : 

1. Comportements des consommateurs : entre désirs et contraintes
2. Les enjeux internationaux : une redistribution des cartes ?
3. E-commerce, proximité : la distribution précipitée dans sa transformation
4. Réinventer la RHF : livraison, dématérialisation, distanciation… quel avenir pour le foodservice ?

Nous espérons que ces éclairages vous seront profitables, tout en gardant en tête que prospective n’est pas prédiction. Et que, souvent, les éléments déclencheurs de grands bouleversements ne sont pas ceux auxquels on pense (sur le sujet, je vous invite vivement à lire cet article passionnant publié sur Maddyness) – une pandémie, personne (ou presque) n’y avait pensé.