31 août 2018 / Compétences et expertise / Vitagora / Sciences et technologies

Comment redonner le plaisir de manger pour lutter contre la dénutrition des Seniors ?

 

Compétences et expertise

 

La dénutrition est une pathologie qui touche un grand nombre de personnes âgées. Si nos connaissances actuelles nous permettent d’améliorer nutritionnellement l’alimentation des seniors, de nombreuses pistes sont encore à explorer pour optimiser le plaisir de manger. Quels sont les facteurs influençant le plaisir alimentaire chez les personnes âgées ? Comment améliorer les repas des seniors dépendants ?  

Pourquoi s’y intéresser ?

  • La dénutrition est une pathologie avec une forte prévalence chez les personnes âgées de plus de 65 ans, d’autant plus après l’entrée en institution ou en hôpital.
  • Lutter contre la dénutrition permettra d’améliorer la qualité de vie des seniors mais aussi de réduire les coûts d’hospitalisation liés à leur prise en charge (augmentation du temps de séjour, augmentation des risques de complications, etc.).
  • Mieux comprendre les déterminants de la prise et du plaisir alimentaires chez les personnes âgées permettra de concevoir des produits alimentaires adaptés et des conseils pour optimiser leur consommation.

 

 

En 2050, un Français sur cinq aura plus de 75 ans (chiffres Insee). Le risque de dénutrition, déjà fortement élevé au sein de la population senior, concernera un nombre grandissant de mangeurs. Cette pathologie touche actuellement 4 à 10 % des personnes âgées vivant à domicile, 30 à 70% de celles hospitalisées et 15 à 38% des seniors en institution (EHPAD et maison de retraite). Ces constats traduisent un besoin croissant de solutions concrètes pour limiter cette prévalence et aider les personnes âgées à retrouver du plaisir alimentaire.

Car la dénutrition des seniors, ce n’est pas seulement une question de nutrition. Longtemps, les apports nutritionnels ont été le point de départ des réflexions pour adapter l’offre alimentaire des seniors (via l’enrichissement, par exemple). Aujourd’hui, on sait que cette approche ne résout pas l’intégralité du problème  : si la personne âgée ne veut pas plus d’une cuillère de son plat – que celui-ci soit enrichi ou non – elle reste à risque de dénutrition. Augmenter la prise alimentaire doit également passer par replacer le plaisir de manger au cœur du repas.

La dénutrition est une pathologie aux multiples facettes qui nécessitent d’être prises en compte de façon globale. Telle était le principe du projet AUPALESENS, labellisé par Vitagora et coordonné par le Centre Hospitalier de Dijon. Ce projet avait pour ambition de démontrer l’importance de la sensorialité, de la psychologie, de la sociologie et la physiologie des personnes âgées dans la lutte contre la dénutrition.

Quel est l’impact des facteurs sensoriels, psychologiques et sociologiques sur le statut nutritionnel des seniors ? Comment améliorer le repas de seniors dépendants pour augmenter le plaisir de manger et donc la prise alimentaire ? Retour sur les résultats marquants du projet AUPALESENS. 

 

Projet ANR AUPALESENS

SeniorFinancé par l’Agence Nationale de la Recherche (ANR), le projet AUPALESENS a réuni sur une durée de quatre ans de nombreux partenaires académiques et privés : le CHU de Dijon, l’ESA, ONIRIS Nantes, l’UMR Aliss de l’INRA Paris, l’UMR CSGA de l’INRA Dijon, le CHU d’Anger, l’Université François Rabelais, Les Repas Santé, Livrac groupe Terrena, Frutarom, Lactalis, Cecab d’Aucy et Entremont Alliance.

Plusieurs objectifs ont été définis pour démontrer l’efficacité des leviers sensoriels pour prévenir et lutter contre la dénutrition : 

  • Etudier l’impact de la dépendance, des facteurs sensoriels, psychologiques, sociologiques et physiologiques sur l’état nutritionnel des seniors
  • Proposer des pistes pour le développement d’aliments adaptés aux attentes et préférences des personnes âgées dépendantes
  • Déterminer l’impact de la dépendance alimentaire sur la perception des repas
  • Observer l’impact de l’amélioration du contexte de la prise du repas sur la prise alimentaire en maison de retraite

Pour atteindre ces objectifs, plus de 600 personnes âgées ont été interrogées : 31% d’hommes et 69% de femmes habitant Dijon, Angers, Brest et Nantes. Le panel de seniors a été choisi de façon à représenter l’ensemble des personnes âgées dont :

  • Celles habitant à domicile sans aucune aide
  • Celles habitant à domicile nécessitant une aide hors alimentation
  • Celles habitant à domicile avec une aide en lien avec l’alimentation
  • Celles vivant en établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes

Site internet du projet 

Une mosaïque de résultats

Les capacités sensorielles sont liées au niveau de dépendance

Les personnes âgées qui ont participé à ce projet ont réalisé plusieurs tests gustatifs et olfactifs. Parmi eux, un test de détection (à partir de quelle concentration l’odeur est-elle perçue ?), de discrimination (la personne peut-elle identifier l’odeur ou le goût de pomme parmi plusieurs ?) et un test de  catégorisation (est-elle capable de nommer chaque odeur et saveur qui lui sont proposées ?).

Les résultats ont montré que les seniors présentant une altération des capacités olfactives étaient les plus nombreux à reporter une mauvaise dentition et une prise de médicaments ayant des effets sur les sens. Un lien est également ressorti entre le niveau de dépendance et les capacités sensorielles, indépendamment de l’effet d’âge. L’augmentation du niveau de dépendance est significativement associée à un déclin des capacités sensorielles. Il semblerait donc que ce déclin soit dû à des événements liés au vieillissement (dégradation de l’état de santé, prises de médicaments, problèmes buccodentaires, etc) entraînant l’augmentation du niveau de dépendance. 

La clé du plaisir de manger : s’approprier le repas

Un questionnaire a permis de sonder les personnes âgées sur l’importance du plaisir à manger et sur le niveau de satisfaction des repas. Les résultats ont montré que le plaisir à manger reste le même quels que soient le niveau de dépendance et le lieu de résidence (domicile, EHPAD). Cependant, la satisfaction pour les repas diminue lorsque la dépendance augmente, encore plus lorsque les activités culinaires sont déléguées à une personne tierce. Une des solutions pour permettre aux personnes âgées de se réapproprier leur alimentation est de mettre à disposition sur la table à manger des condiments. Ajouter du poivre, du sel ou de la moutarde est une façon pour les seniors de personnaliser leurs plats, de l’accommoder à leur goût. Autre résultat intéressant issu du projet AUPALESENS : lorsque deux légumes sont proposés dans l’assiette, les seniors augmentent leur consommation de viande d’environ 32%. Une stratégie supplémentaire à développer pour permettre aux seniors de manger plus.

Sélectivité & authenticité, deux paramètres à prendre en compte

Les résultats liés à cette étude ont également mis en lumière l’importance pour les seniors de savoir ce qu’ils mangent et d’où vient la nourriture. Plus les personnes âgées disposent d’informations sur ce qu’elles mangent, plus l’état nutritionnel est satisfaisant. Cuisiner des plats familiers (bœuf bourguignon, ratatouille, coq au vin, pot-au-feu, …), choisir des ingrédients locaux et indiquer leur provenance sont des dispositions simples mais qui feront toute la différence pour les seniors.  De plus, les chercheurs ont montré que la sélectivité des aliments augmente au fur et à mesure que progresse la dépendance des personnes âgées. Or, plus les personnes âgées deviennent difficiles en matière d’alimentation plus l’état nutritionnel est altéré.

 

Des pistes d’améliorations pour l’agroalimentaire

Le projet AUPALESENS a permis d’identifier des pistes pour améliorer l’offre alimentaire des seniors :

  • Tout d’abord, il semble important de travailler sur des recettes avec des ingrédients connus des personnes âgées, tels que le bœuf, la pomme de terre, le navet, le lapin. Les aliments comme la patate douce, le quinoa ou encore la papaye qui ne sont pas forcément connus essuieront un rejet de la part de seniors.
  • Ensuite, d’optimiser les plats pour stimuler le plus possible les sens olfactifs et gustatifs. Par exemple, utiliser des aliments savoureux avec un goût prononcé ou des ingrédients activant par exemple le goût umami comme la sauce soja.
  • De travailler sur la taille des portions… : les seniors n’ont pas tous le même appétit et cela joue sur la perception de l’assiette. Un plateau rempli à ras bord pourra dégoûter les petits mangeurs. Adapter les portions au profil de la personne âgée permettra d’optimiser ses apports mais aussi de limiter le gaspillage.
  • … Mais aussi la présentation : ils s’accordent pour dire qu’un mixé de poulet, de carottes et de pommes de terre ne donne pas envie. Il semble donc important de fournir aux personnes âgées avec un bon état buccodentaire des aliments entiers et bien cuits et à celles ne pouvant plus mâcher des aliments mixés mais pourquoi pas retravaillés grâce à des moules pour obtenir une jolie forme et donc une belle présentation.

 

Pourquoi ne pas faire appel à un panel de personnes âgées pour de la co-création ? Une commission du goût a été créée dans le cadre de ce projet et à permis d’améliorer des plats comme la blanquette de veau ou la purée bœuf carotte. Pour la blanquette, les personnes âgées ont conseillé d’utiliser des champignons entiers plutôt qu’en lamelle et d’ajouter du jus de citron à la sauce. Pour la purée, le panel a proposé de séparer le bœuf et la carotte de la purée. Des solutions simples, peu coûteuses mais faisant la différence pour les papilles des personnes âgées.

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Les mots-clés

Dénutrition, alimentation, vieillissement, personnes âgées, seniors, sensorialité, dépendance

 

Envie d'aller plus loin ?

  • Sulmont-Rossé, C. (2016). Goût, préférences et comportements alimentaires.
  • Sulmont-Rossé, C., Maitre, I., Amand, M., Cariou, V., Vigneau, E., and Van Wymelbeke, V. (2012). Evolution de la perception sensorielle et des préférences alimentaires chez les personnes âgées : quel lien avec le statut nutritionnel  ?
  • Sulmont-Rossé, C., Maitre, I., Amand, M., Symoneaux, R., Van Wymelbeke, V., Caumon, E., Tavarès, J., and Issanchou, S. (2015). Evidence for Different Patterns of Chemosensory Alterations in the Elderly Population: Impact of Age Versus Dependency. Chem. Senses 40.

 

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