06 mars 2019 / Compétences et expertise / Vitagora / Sciences et technologies

Protection des plantes contre les phytopathogènes par le biocontrôle : l’exemple du pois

 

Compétences et expertise

 

Le pois est un protéagineux, de la famille des légumineuses, très intéressant de par sa composition nutritionnelle et ses faibles besoins en engrais azotés. Cependant, cette plante est soumise à différents stress dont les microorganismes phytopathogènes qui diminuent son rendement. Afin de promouvoir une agriculture durable, le biocontrôle semble être une solution naturelle à envisager. Qu’est-ce que le biocontrôle ? Quels sont les effets sur la plante ? Quels sont les avantages ?

 

Pourquoi s’y intéresser ?

  • Le pois est une légumineuse de la famille des protéagineux possédant une composition nutritionnelle intéressante pour l’alimentation humaine et animale.
  • Sa culture est à la fois bénéfique pour la composition du sol, pour le rendement des cultures suivantes et sur la baisse d’utilisation d’engrais et pesticides.
  • L’agent pathogène Aphanomyces euteiches, responsable de la pourriture racinaire, cause de graves dommages sur les cultures de pois.
  • Dans la mesure où il n’existe aujourd’hui aucune méthode de lutte efficace contre la pourriture racinaire, le biocontrôle pourrait constituer un levier pour limiter le développement de la maladie.

Le pois est une plante cultivée pour ses graines consommables « en vert » en tant que petit pois, récoltées à maturité en tant que pois sec pour l’alimentation humaine, ou consommable en tant que fourrage pour les ruminants. Elle fait partie de la famille de protéagineux, appartenant à la grande famille des légumineuses. Ces plantes sont intéressantes à la fois sur le plan environnemental grâce à leur capacité à fixer l’azote présent dans l’air et les sols mais également sur le plan nutritionnel grâce à leur composition riche en protéines des graines pour l’alimentation humaine et animale.

Avec une population mondiale croissante, l’augmentation des approvisionnements en nourriture tout en réduisant l’usage d’engrais et de pesticides est un défi majeur. Le pois est une excellente alternative au soja, notamment pour l’alimentation animale. Sa culture a également des propriétés bénéfiques pour les sols en permettant aux cultures suivantes d’être plus performantes et de réduire leurs besoins engrais et herbicides.

 

Cependant, le pois subit différents stress (biotiques et abiotiques) réduisant les rendements et la confiance des agriculteurs au regard de la stabilité des revenus engendrés. Parmi ces stress la pourriture racinaire due à Aphanomyces euteiches est une préoccupation majeure.

 

Sylvain Jeandroz, enseignant-chercheur à l’UMR Agroécologie et acteur du projet « Agroécologie en BFC » porté par l’i-SITE UBFC (coord. Nicolas Munier-Jolain, UMR Agroécologie), nous partage son expertise sur le biocontrôle et son application au pois.

 

EcoSec

Sylvain Jeandroz

Professeur à AgroSup Dijon

Sylvain Jeandroz réalise ses recherches dans l’UMR Agroécologie. Il est responsable du pôle « Fonctionnement et Gestion des Interactions Plante Microorganismes » (IPM) de l’unité qui a pour objectifs de comprendre les différentes interactions entre la plante et les microorganismes. Etudier les mécanismes de l’immunité végétale, l’écologie des microorganismes pathogènes et bénéfiques et concevoir des solutions de biocontrôle pour les cultures afin de favoriser la protection de la plante sont différents buts à atteindre pour le pôle IPM. Les recherches du pôle sont menées sur différentes plantes, de la plante modèle Arabidopsis aux plantes cultivées comme le pois, la tomate ou la vigne.

 

Le pôle IPM se compose de plusieurs équipes alliant recherche fondamentale et finalisée, de la cellule à la plante dans son milieu naturel, et interdisciplinarité (biochimie, écologie microbienne, physiologie). Si la production d’articles scientifiques est le premier objectif du pôle, valoriser les recherches développées en proposant des solutions agroécologiques utilisables au champ ou grâce au dépôt de brevet est aussi une volonté.

Qu’est-ce que le biocontrôle ?

D’après le Ministère de l’Agriculture, le biocontrôle est « un ensemble de méthodes de protection des végétaux basé sur l’utilisation de mécanismes naturels ».

 

Seules ou associées à d’autres moyens de protection des plantes, ces techniques sont fondées sur les mécanismes et interactions qui régissent les relations entre espèces dans le milieu naturel et  permettent de diminuer, voire même de se passer de, l’utilisation de produits phytosanitaires de synthèse tout en protégeant la plante contre les agresseurs (organismes pathogènes, insectes, plantes adventices, …). Le biocontrôle peut être réalisé grâce à des produits composés de micro-organismes, de médiateurs chimiques (phytohormones), de substances naturelles d’origine végétale, animale ou minérale et des macro-organismes.

 

Des microorganismes au service des plantes

Le mutualisme plante/microorganisme : un partenariat gagnant-gagnant

Le mutualisme, en biologie, est une interaction naturelle entre deux espèces qui tirent chacune profit de cette relation. Dans le cas des plantes, certains microorganismes ont des effets bénéfiques lorsqu’ils sont présents dans leur rhizosphère. « Ils apportent des nutriments à la plante, notamment de l’azote, du phosphore et d’autres micronutriments et consomment les exsudats carbonés produits par la plante au niveau des racines. Cela permet à la plante de recevoir plus de nutriments, d’être plus forte et vraisemblablement de se protéger de façon plus efficace contre les stress », rajoute Sylvain.

Compétition entre bon et mauvais microorganismes

« Il est possible de créer une situation de compétition entre les microorganismes bénéfiques et les microorganismes pathogènes dans le sol. Lorsque les microorganismes bénéfiques sont inoculés à la plante au niveau de ses racines, ils vont se développer, se multiplier et dans certains cas sécréter des antibiotiques contre les organismes pathogènes, empêchant ainsi leur prolifération et l’infection de la plante. »

Un état de stress bénéfique

La présence de microorganismes au niveau des racines de la plante entraîne aussi chez cette dernière un état de stress latent et la mise en place de défenses. « La plante perçoit les microorganismes comme des organismes extérieurs et se met dans un état de veille qui lui permet de mieux se défendre face aux réelles agressions », précise Sylvain.

 

 

Biocontrôle pour  le pois : des essais de la serre aux champs

Le projet « Agroécologie en BFC » vise à identifier des systèmes agroécologiques de grandes cultures performants sur les plans agronomiques et environnementaux, et qui soient viables économiquement et socialement pour l'agriculteur et le territoire (en apprendre plus sur le projet ici).

 

Dans le cadre de ce projet, des premiers essais de biocontrôle du pois ont été réalisés en 2017. « Nous avons réalisé des essais en conditions contrôlées (serres) où nous avons semé des graines de pois puis inoculé le microorganisme pathogène Aphanomyces euteiches. Nous avons traité préalablement les plantes avec les produits de biocontrôle en plus du pathogène pour observer leurs effets sur la survie de la plante, la biomasse des parties aériennes et souterraines et la colonisation de la racine par le pathogène », explique Sylvain.

 

Si les résultats en conditions contrôlées sont souvent efficaces et reproductibles, ils ne sont pas représentatifs de ce qui se passe réellement dans des conditions naturelles. Des essais ont donc été réalisés en champ. « En champ, les conditions de production sont très différentes de celles rencontrées en serres : mode d’applications des agents de biocontrôle, état physiologique de la plante, conditions plus ou moins favorables à l’infection... Cependant, grâce à ces expérimentations, nous espérons identifier les meilleures solutions de biocontrôle possibles pour cette plante mais l’utilisation optimale nécessitera de prendre en compte de nombreux nouveaux paramètres. »

 

« En collaboration avec Christian Steinberg du pôle IPM, qui participe également au projet, nous avons décidé de tester deux types de produits de biocontrôle : les stimulateurs de défense de la plante (SDP) et les microorgorganismes bénéfiques »

 

Les stimulateurs de défense des plantes (SDP)

Sylvain Jeandroz l’affirme : « les connaissances accumulées entres autres dans notre pôle de recherche IPM sur les mécanismes moléculaires contrôlant les interactions plante-pathogène ont permis d’identifier des signaux moléculaires associés à la résistance des plantes aux maladies ».

 

Les traitements des plantes par pulvérisation ou arrosage par ces signaux ou par des molécules mimant ces signaux constituent une nouvelle stratégie de protection préventive des cultures qui permet de diminuer les quantités de produits phytosanitaires. Ces molécules sont appelées « éliciteurs » ou stimulateurs des défenses des plantes (SDP).

 

« Les modes d’action de ces molécules de sont pas entièrement connus. Les SDP conduisent à l’induction de résistance chez la plantes par stimulation des mécanismes de l’immunité végétale, mais peuvent avoir également une action directe sur le pathogène ».

 

Une solution de biocontrôle efficace à déterminer

« S’il existe déjà des produits de biocontrôle connus (SDP ou microorganismes), décrits dans la littérature et/ou commercialisés, le but de nos recherches est d’identifier de nouveaux produits, d’éliciter leur mode d’action et d’optimiser les conditions d’applications capables d’avoir une action positive sur les défenses de la plante », continue-t-il.

 

« Les résultats attendus se situent à différents niveaux. La lutte contre les stress contribuera à la stabilisation des rendements du pois et à la diversification de  la production de protéines végétales. »

 

« De manière plus générale, nos travaux nous permettront de mieux comprendre les mécanismes de résistance des plantes face aux maladies des plantes et de développer des solutions de biocontrôle efficaces pour une agriculture durable », conclut Sylvain.

 

Les mots-clés

Biocontrôle, SDP, microorganismes bénéfiques, immunité végétale, pois, Aphanomyces euteiches

 

 

Elodie Da Silva

 

Pour en savoir plus...

Pour en savoir plus sur les travaux de Sylvain Jeandroz et du pôle IPM ou pour être mis en relation avec cette équipe de recherche, contactez Elodie Da Silva, chargée de projets à Vitagora :  elodie.dasilva@vitagora.com.

 

Changement climatique, réduction de l’utilisation des pesticides, optimisation nutritionnelle : les légumineuses sont au cœur des débats actuels – et aussi de la recherche. Découvrez plus d’avancées scientifiques dans le domaine lors de la conférence ICLGG qui se tiendra à Dijon, du 13 au 17 mai 2019. Pour en savoir plus sur le programme ou pour vous inscrire, rendez-vous sur http://iclgg2019.com/

Ingénieure agroalimentaire originaire de Toulouse, Elodie accompagne Marine dans le suivi des projets collaboratifs des membres de Vitagora, avec bonne humeur, professionnalisme et enthousiasme : recherche de partenaires, fléchage de financements, gestion du projet, etc.

 

Envie d'aller plus loin ?

  • Thalineau E., Fournier C., Gravot A., Wendehenne D., Jeandroz S., Truong H.-N. (2018). Nitrogen modulation of Medicago truncatula resistance to Aphanomyces euteiches depends on plant genotype. Mol. Plant Pathol. 19:664-676.
  • Lecomte C., Alabouvette C., Edel-Hermann V., Robert F., Steinberg C. (2016). Biological control of ornamental plant diseases caused by Fusarium oxysporum: A review. Biol. Control. 101:17-30.
  • Brulé D., Villano C., Davies L.J., Trdá L., Claverie J., Héloir M.-C., Chiltz A., Adrian M., Darblade B., Tornero P., Stransfeld L., Boutrot F., Zipfel C., Dry I.B., Poinssot B. (2018) The grapevine (Vitis vinifera) LysM receptor kinases VvLYK1-1 and VvLYK1-2 mediate chitooligosaccharide-triggered immunity. Plant Biotechnol. J. doi: 10.1111/pbi.13017
  • Pfister C., Bourque S., Chatagnier O., Chiltz A., Fromentin J., Van Tuinen D., Wipf D., and Leborgne-Castel N. (2017) Differential signaling and sugar exchanges in response to avirulent pathogen-and symbiont-derived molecules in tobacco cells. Front Microbiol 8 2228

VOUS SOUHAITEZ ADHÉRER À VITAGORA ? Contactez-nous !


Votre contact :

Pauline Fuster

pauline.fuster@vitagora.com

+33 (0)3 80 78 97 91

LE COVID-19 : INFORMATION IMPORTANTE

Compte-tenu des mesures prises par le gouvernement, concernant la situation sanitaire liée à la propagation du virus COVID-19, toutes les réunions physiques, manifestations, et visites en entreprise sont à nouveau suspendues à partir du vendredi 30 octobre 2020 à minima jusqu'au 1er décembre.

Cependant, tout comme lors du confinement de printemps, toute l’équipe Vitagora adopte des mesures de télétravail et reste entièrement disponible pour répondre à vos questions et demandes liées aux services et actions proposés par Vitagora.

Nous vous rappelons qu’une cellule de crise au sein de Vitagora liée à l’impact du COVID-19 sur l’activité de nos entreprises agroalimentaires régionales, en lien avec l’ANIA et les autorités régionales, est toujours en place.

Vous pouvez joindre cette cellule de crise pour toute demande relative à ce sujet au 06 72 39 66 96, Tom Vaudoux, ou par email, au elisabeth.lustrat@vitagora.com.

Nous utilisons des cookies afin de mesurer l’audience de notre site et d'optimiser votre expérience utilisateur. En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez la politique d’utilisation des cookies.

J'ACCEPTE EN SAVOIR PLUS