21 juin 2022

Décarbonation des entreprises agroalimentaires : vos leviers d’action à disposition

 

Avec une hausse des émissions de carbone d’environ 0,8 Gt/an depuis le début des années 2000, la maitrise des émissions de carbone est un enjeu mondial majeur du 21e siècle. Si l’activité industrielle est indispensable à notre économie et à nos sociétés, et d’autant plus l’activité agroalimentaire dont l’objectif premier est de nourrir les populations en croissance, il est devenu impératif de réduire ses émissions de carbone. En conséquence, de nombreux pays orientent leurs politiques pour tendre vers une économie moins consommatrice en énergies non renouvelables.

La décarbonation est l’ensemble des actions visant à réduire progressivement l’émission de gaz à effets de serre (dioxyde de carbone, méthanes, etc.) ou à améliorer le stockage sous-terrain du dioxyde de carbone. Pourquoi, en tant qu’entreprises de l’agroalimentaire, il est essentiel de vous emparer de ce sujet ? Quels sont vos leviers d’action ? Le point dans cet article.

 

Un contexte environnemental et réglementaire

Lors d’un webinaire animé par notre partenaire EDF (à revoir en ligne ici), Laurent Nicot, responsable développement Bourgogne-Franche-Comté chez EDF et responsable de l’accompagnement Opti’Impact d’EDF, revenait sur le contexte de la décarbonation. « La question ne fait plus débat : c’est devenu un sujet historique, avec des sommets d’émission carbone jamais atteints jusqu’à aujourd’hui. »

En effet, à l’échelle mondiale, les émissions de CO2 anthropique (c’est-à-dire, résultant de l’activité humaine) sont passées de 10 Gt/an à la fin des années 1950, à 25 Gt/an au début des années 2000 à presque 40 Gt/an aujourd’hui. Cette hausse exponentielle s’est organisée autour de 3 grandes périodes :

  • L’après-guerre et le développement économique : développement des moyens de transports (1e cause d’émissions de carbone au niveau mondial), et hausse de l’activité industrielle (20% des émissions étant en lien avec l’activité industrielle)
  • Une première accélération de cette progression dans les années 1980-1990
  • Une seconde accélération, encore plus forte, depuis le début des années 2000.


Face à cette situation, les réglementations en faveur de la réduction des émissions de CO2 se multiplient
: la loi ELAN et son décret tertiaire sur les locaux d’activité à usage tertiaire (bureaux, entrepôts logistiques…), la loi LOME autour des transports, la réglementation F-GAS concernant les fluides frigorigènes, la loi DDADUE et son audit énergétique obligatoire pour les grandes entreprises, etc. Le système normatif a également évolué avec de nouvelles versions de normes phares comme l'ISO 50001 « Management de l’énergie », la norme ISO 14064 « Gaz à effet de serre », etc. La transition écologique est également l’un des piliers fondamentaux du plan de relance « France Relance », avec de nombreuses opportunités financières à saisir par les industriels pour réaliser des investissements visant à réduire leur impact carbone.

L'industrie agroalimentaire a tout à gagner à s’y intéresser : baisse de la facture énergétique dans un contexte de hausse du coût de l’énergie, gain en compétitivité, implication environnementale (RSE), etc. De nombreuses aides financières existent (Ademe, bpi, aides régionales, plan de relance, etc.) : pour en savoir plus, je vous invite à revoir en ligne notre webinaire sur le sujet.

 

Décarbonation : 3 périmètres d’action  

La décarbonation, qu’il s’agisse de réduire progressivement l’émission de gaz à effets de serre ou d’améliorer le stockage sous-terrain du dioxyde de carbone, se décline en 3 périmètres d’actions (« scopes ») ainsi que le définit la norme internationale ISO 14064 :   

  1. Dans le premier périmètre d’actions, on retrouve tout ce qui relève des émissions directes : par exemple, à l’échelle d’une entreprise agroalimentaire, il s’agit du chauffage des locaux, de l’émission carbone des véhicules de l'entreprise, etc.
  2. Le scope 2 concerne les émissions indirectes liées à l'énergie (notamment électrique) : par exemple, la consommation électrique liée à la production.
  3. Le scope 3 intègre les émissions de carbone en lien avec l’activité de l’entreprise mais de façon indirecte : l’approvisionnement en matières premières, le packaging et le recyclage, la chaine logistique pour fournir une usine en matières premières, etc.

Alors, comment agir ?

Pour Jean-Manuel MORANT, Président d’IPSB, société d’ingénierie de procédés qui intervient notamment pour réaliser des audits énergétiques dans les entreprises, deux leviers principaux peuvent être actionnés par les industriels de l’agroalimentaire pour limiter leur empreinte carbone : 

  • Le sourcing de matières premières ;
  • En améliorant la consommation énergétique des bâtiments et de la production industrielle en tant que telle, notamment à l’occasion de l’amélioration de l’outil de production (qu’il s’agisse de faire face à une hausse du besoin de production ou pour répondre des contraintes réglementaires ou techniques nouvelles).

 

Agir sur le choix des matières premières agricoles

Etienne Variot est co-fondateur et CEO de Rize ag, une start-up qui permet aux exploitations agricoles européennes d’identifier des leviers de réduction de leur empreinte carbone et de financer leur action climat, lauréate de l’EcoAgriFood Challenge que nous avons organisé l’année dernière. Pour lui, il est essentiel que les entreprises industrielles de l’agroalimentaire s’emparent du sujet de la décarbonation dès la production agricole : « il faut être conscient que, dans le secteur alimentaire, 70% de l’empreinte carbone se passe sur l’exploitation agricole, et repose sur les choix de matières premières et de mode de production ».

« Si le scope 3 ne représente pas le périmètre d’action le plus direct pour une entreprise agroalimentaire, c’est sans aucun doute celui qui impacte le plus significativement son empreinte carbone », ajoute-t-il avec conviction. Sur cet aspect, il est aussi optimiste : « les leviers d’optimisation sont multiples et peuvent dépendre de différents facteurs : insertion de légumineuses, allongement des rotations, agroforesterie, fertilisation par matière organique, couverts intermédiaires, et encore stockage de carbone dans les sous-sols… Il y a de nombreuses opportunités, notamment par application de pratiques agroécologiques bénéfiques pour les sols, et au-delà du seul sujet des intrants. »

L’offre de Rize ag est aujourd’hui principalement destinée aux exploitations agricoles : bilan carbone d’une exploitation (cartographie de l’ensemble des flux physiques, évaluation du poids carbone pour chaque opération, etc.), modélisation de l’évolution de la teneur en carbone du sol (selon les pratiques, les sols, la température, l’humidité, etc.), identification de leviers d’actions et pilotage/traçabilité dans la durée (intelligence artificielle et imagerie satellitaire), et financement par crédits carbones. Actuellement, l’équipe d’Etienne Variot développe en parallèle une offre destinée aux industriels de l’agroalimentaire pour leur permettre de suivre directement l'empreinte carbone (scope 3) de leurs approvisionnements auprès des agriculteurs et de piloter et financer leur trajectoire de réduction.

 

Améliorer l’autonomie énergétique de l’entreprise

« Il n’est pas toujours évident pour une industrie de visualiser tous les aspects jouant sur son empreinte carbone », reconnaissait Laurent Nicot lors de notre webinaire intitulé « Comment et pourquoi réduire son empreinte carbone » (à revoir ici).

En effet, de nombreux paramètres peuvent améliorer l’empreinte carbone d’une entreprise agroalimentaire :

  • Augmenter la part de l’autoconsommation électrique solaire, issue de photovoltaïque en toiture ou en ombrières de parking par exemple.
  • Transformer sa flotte de véhicules, en passant du thermique à l’électrique. « Dans certaines entreprises, c’est un sujet vraiment clé, car elles comportent des véhicules commerciaux, de direction, et des camions logistiques », précise Laurent Nicot. Sur ce point, des solutions de recharge intelligentes peuvent aussi être mises en œuvre : par exemple, avec le « smartcharging », le véhicule électrique peut devenir lui-même une source de recharge pour le réseau électrique, en restant branché lors d’appels de pointe de puissance sur le réseau électrique, à l’instar d’une énergie de substitution. Une autre action peut être la dépollution des moteurs, comme le présentera Alphagreen lors de notre prochain club Engagement Durable : ne loupez notre Fiche Performance sur le sujet !
  • Adapter ses utilités aux solutions plus respectueuses pour l’environnement : analyse des moyens de production de froid et d’air comprimé, perspectives de récupération de chaleur, motorisation variable, etc. « Il y a énormément d’énergie à récupérer sur ces aspects », rappelle Laurent Nicot.
  • Généraliser les éclairages LED


« Dans l’industrie agroalimentaire, il est possible de travailler à la fois sur l’efficience des processus et sur l’efficience des ateliers d’utilités (chaleur, froid, air comprimé, etc…) », confirme Jean-Manuel Morant. Dans le cadre de l’activité de son entreprise, il constate que le développement de certaines technologies sur les opérations unitaires les plus énergivores : par exemple, la re-compression mécanique de vapeur qui permet de substituer la vapeur par de l’électricité, ou encore le séchage à la vapeur surchauffée, etc…

Pour les processus complexes et continus, ces investissements seront d’autant plus rentables s’ils sont réfléchis et pensés avec les bons outils d’analyse : audit énergétique ou outils méthodologiques adaptés du type, méthode du pinch (ou pincement) … 

De façon générale, je vous conseille avant tout de réaliser un état des lieux et de mettre en place un suivi d’indicateurs de performance énergétique, par exemple dans le cadre d’une certification ISO 50001 ou dans le cadre de la loi ELAN : quels ateliers consomment le plus, comment ils se positionnent par rapport aux meilleures technologies disponibles, quels scopes de décarbonation peuvent être priorisés, etc. En plus de vous aider à prendre le recul nécessaire, un tel bilan vous permettra d'identifier des premières pistes d’amélioration à mettre en œuvre… et suivre l’évolution de votre empreinte carbone. Pour en savoir plus, téléchargez ici notre fiche performance « Norme ISO 50001 : améliorer les performances énergétiques de votre entreprise ».

 

Pour aller plus loin

La décarbonation vise non seulement à augmenter l’efficacité carbone d’une entreprise, mais s’inscrit également dans une recherche de plus de durabilité globale : valorisation des co-produits, amélioration du recyclage, réemploi des emballages, etc. sont également des aspects à étudier. Pour en discuter avec d’autres industriels et partager vos bonnes pratiques, nous avons mis en œuvre un Club « Entreprise Responsable » : pour en savoir plus, et si vous êtes intéressés pour nous rejoindre, contactez-moi par e-mail sur emeline.simon@vitagora.com.

 

A consulter également sur le sujet :

 

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