02 oct. 2018

Sensorialité : peut-on agir sur le « goût chloré » de l’eau du robinet ? (un sujet de nos placards)

Crédits photos : www.unsplash.com

 

Au détour d’un archivage de nos anciens articles cet été (vous savez, le type de programme que l’on se réserve toujours pour le mois d’août), j’ai retrouvé les conclusions du projet Sens’Eau. Ce projet, qui s’est achevé en 2011, était très original dans son sujet (lutter contre le goût chloré de l’eau du robinet), et très pertinent par rapport à la sensorialité des consommateurs.

Pourquoi certains consommateurs perçoivent-ils plus le chlore que d’autres ? Comment les producteurs d’eau peuvent-ils remédier à cela ? Et près de 10 ans après, quel regard Eric Teillet, co-fondateur de SensoStat et impliqué dans le projet Sens’Eau dans le cadre de sa thèse au CSGA, porte-t-il sur ces résultats ?

Accédez à la version complète dans notre article « compétences et expertise » – réservé aux adhérents).

Le chlore : indispensable pour garantir une eau saine

L’eau est une matrice pouvant se charger de particules avec lesquelles elle rentre en contact : éléments minéraux, métaux mais aussi organismes vivants. Parasites, bactéries et virus peuvent s’y développer et entraîner la propagation de maladies. L’assainissement de l’eau est une priorité pour éliminer ces microorganismes et garantir la sécurité sanitaire pour les consommateurs.

A cette fin, le chlore est un élément chimique naturel désinfectant couramment utilisé comme biocide dans l’eau potable, tuant efficacement bactéries et autres microorganismes. Sa concentration est réglementée et constamment contrôlée afin d’obtenir une eau saine… sans trop altérer son goût. Pour autant, certaines eaux ont un vrai « goût chloré » : pourquoi ? et comment agir ?

Neutraliser le goût du chlore : le projet SENS’EAU

Le projet SENS’EAU, labellisé par Vitagora, avait pour objectif de mettre en évidence les moyens potentiels pour la neutralisation du chlore et de participer à l’optimisation des normes de production.

Lancé en 2006, il a réuni le Groupe Suez, le Centre des sciences du goût et de l’alimentation (CSGA) et le groupe Robertet sur une durée de 3 ans.

Deux thèses ont été publiées portant sur :

  • Le goût intrinsèque de l’eau et les préférences des consommateurs,
  • La perception de la flaveur de chlore par les consommateurs.

Ces recherches ont apporté de nombreuses réponses pour les industriels et distributeurs d’eau à des questions clés pour l’optimisation des normes de production. Voici quelques-uns des enseignements clés de ce programme très original (en savoir plus dans notre article « Compétences et expertise » - exclusivité adhérents)… et le regard d’Eric Teillet, chercheur impliqué dans le projet Sens’Eau et aujourd’hui Responsable Scientifique et Statistique chez SensoStat, plus de 10 ans après le démarrage de ce projet.

1.      Le chlore n’est pas un « goût »

Les mécanismes impliqués dans la perception du chlore étaient en effet jusqu’alors méconnus. Ces travaux ont permis de mettre en évidence que le « goût du chlore » n’est pas un goût à proprement parler mais plutôt une flaveur, correspondant à l’ensemble des sensations olfactives, gustatives et rétro-nasales. Les molécules odorantes se libèrent en bouche, passent par l’arrière du palais pour arriver au système olfactif, au lieu de passer directement par le nez.

2.      La composition minérale de l’eau modifie la perception du chlore

Des eaux expérimentales et des eaux embouteillées, toutes chlorées dans les mêmes proportions, ont été comparées afin d’observer l’effet de la composition minérale de l’eau sur la perception du chlore. La concentration des éléments cationiques comme le calcium, le magnésium ou le sodium module le goût de l’eau et l’intensité du chlore. Les eaux peu minéralisées contenant une quantité notable de sodium sont perçues par les consommateurs comme étant les plus chlorées. Les producteurs pourraient surveiller la minéralité de l’eau et trouver le bon équilibre pour satisfaire les consommateurs.

3.      Physiologie buccale & préférences : des paramètres à étudier

Il semblerait que le pH salivaire puisse également jouer un rôle dans la perception du chlore. Des interactions physico-chimiques spécifiques à chaque individu pourraient être à l’origine de différences de perception entre les consommateurs. Ce lien restait à valider par de plus amples investigations. Fait intéressant également : il est possible d’aimer la flaveur de chlore dans l’eau, paramètre qui n’a pas été pris en compte dans le cadre du projet, tout comme l’accoutumance à certaines eaux. En effet, l’échantillon d’eau le plus apprécié par les participants était très proche de l’eau délivré par robinet à Dijon et ses environs.  

4.      On aime ce à quoi on est habitué… ou parce que l’on est bien informé !

Il semblerait que plus la qualité de l’eau varie plus son acceptabilité diminue. La constance de la composition de l’eau du robinet, chlore et minéralité est donc cruciale pour favoriser sa consommation.

Eric Teillet, chercheur impliqué dans le projet Sens’Eau et aujourd’hui Responsable Scientifique et Statistique chez SensoStat, revient sur ces résultats plus de 10 ans après le démarrage du projet : « A mes yeux, masquer la flaveur du chlore par des additifs n’était pas forcément une bonne solution : d’une part, parce que ce projet nous a prouvé que cela est très complexe. D’autre part, parce que l’acceptation d’additifs supplémentaires dans l’eau par les consommateurs n’a pas été étudiée.

A mes yeux, la façon d’agir la plus efficace sur l’acceptabilité de l’eau du robinet consiste à bien communiquer et informer les consommateurs. Dans le cadre de ce projet et d’études de groupes de consommateurs, nous avons pu remarquer que le seul groupe qui modifiait sensiblement sa consommation d’eau du robinet était celui à qui l’on avait transmis l’information du gain économique que représente cette eau, environ 100 fois moins chère que l’eau en bouteille. On peut parier, 10 ans plus tard, que l’avantage écologique (et notamment réduction du plastique) peut constituer un autre facteur en faveur de l’eau du robinet. »

 

Pour aller plus loin

Un véritable travail de communication semble donc toujours nécessaire pour valoriser l’eau du robinet auprès des consommateurs, même si l’aspect environnemental peut jouer en faveur de son image.

Pour lire l’intégralité de notre article « compétences et expertises » sur ce sujet, connectez-vous à l’espace innovation (article réservé aux adhérents de Vitagora). Si vous êtes intéressé par les équipes et chercheurs qui ont mené ces travaux, contactez-moi.

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