24 oct. 2017

Eduquer au bien-manger : quelle place pour les industriels ?

Crédits photo : FreePik


Les derniers chiffres sur l’obésité infantile, tombés ce mois-ci, ont de quoi effrayer : depuis 1975, le nombre d’enfants et d’adolescents obèses à travers le monde a été multiplié par 10. En France, le surpoids concerne près de deux millions d’enfants, soit un enfant sur six. Les produits alimentaires transformés étant souvent pointés du doigt comme les principaux responsables, et alors que le dernier rapport de l’ANSES confirme la hausse de leur consommation, quel rôle peuvent jouer les industriels de l’agroalimentaire dans l’éducation au bien-manger des enfants ? Ici, nous évoquions le projet « Goûts en famille » , avec la participation de deux industriels et d’une interprofession. Une autre approche a été mise en place cet automne par Sopexa : une BD dédiée directement aux enfants de 9 à 12 ans, intitulée Mission MIAM.

Des consommateurs sensibilisés… mais plein de doutes

Pouvoirs publics, professionnels de santé, et particuliers, sont désormais tous sensibilisés aux enjeux d’une alimentation équilibrée. Selon une enquête INPES réalisée en 2008, 70 % des Français (adultes) affirment avoir retenu les messages nutritionnels du PNNS, dont la diffusion est obligatoire depuis 2007 pour les publicités alimentaires. Près de 10 ans plus tard, un rapport de l’INSERM démontre en revanche une certaine lassitude envers les messages, qui attirent de moins en moins l’attention. Mais qu’en est-il des enfants ?

Selon Kafia Ayadi et Pascale Ezan (dans leur étude « Pour bien grandir, mange au moins 5 fruits et légumes par jour ! »… Impact des bandeaux sanitaires sur les pratiques alimentaires des enfants, Management & Avenir n° 48 Ayadi, Ezan, 2011, disponible ici), « si la finalité de ces bandeaux est comprise, la portée du message n’est pas toujours correctement assimilée par les enfants ». Les auteures notent d’ailleurs que « seuls [sic] un des messages semblent avoir été parfaitement mémorisés par les enfants et leurs parents ».

Armelle Dardaine-Leopoli, directrice du pôle nutrition de Sopexa, a fait le même constat lors des ateliers pédagogiques qu’elle a animés pendant plus de 20 ans : « les enfants sont exposés à une multitude de messages nutritionnels. Même s’ils les connaissent par cœur, bien souvent, ils ne les comprennent pas ! »

Ainsi, si le message « 5 fruits et légumes par jour » est retenu d’une grande majorité, beaucoup ne savent pas comment le comprendre : parle-t-on de 5 fruits et de 5 légumes ? Une cerise correspond-elle à un « fruit » ? Une soupe composée de plusieurs légumes compte-t-elle pour 1, 2, 3, ou plus ?

« Il faut donner aux enfants les clés pour leur permettre de se responsabiliser sur leurs choix alimentaires. Nous avons imaginé un outil pédagogique qui leur parle : une BD, où ce sont des enfants qui s’expriment, ce qui nous permet de conserver une bonne proximité avec nos lecteurs. »


Mission MIAM de Sopexa

L’importance d’informer sur les produits transformés 

Le dernier rapport de l’ANSES sur l’alimentation des Français (2017) conclut que la présence des produits transformés dans l’assiette des Français a augmenté depuis 2007.

Pour autant, Armelle Dardaine-Leopoli regrette que « peu d’outils traitent de l’alimentation de manière globale. Fruits, légumes, sucre, sel, eau : les discours pédagogiques abordent l’alimentation de manière sectorielle, par les familles d’aliments. C’est un bon début. Mais dans la vraie vie, les repas ne sont pas une somme de catégories d’aliments. Ce sont avant tout des situations : un déjeuner pris à la cantine, un pique-nique, une fête de famille, un plateau-télé, etc., où les produits transformés sont souvent présents. »

L’idée de la BD n’est pas de projeter un comportement idéal, mais bien de décrypter des situations proches de la réalité du quotidien des enfants, où boissons, plats composés, desserts, charcuterie, biscuits…, ont toute leur place, aux côtés des fruits et légumes.

« Il s’agit d’aider les enfants à faire le rapprochement entre ce qu’ils voient dans leurs assiettes et les repères qui leur sont donnés. »

S’associer sans prendre part : la place des industriels

Si la sensibilisation du grand public, et notamment des enfants, aux enjeux de l’alimentation est au cœur des missions de Sopexa, les industriels de l’agroalimentaire ont également une vraie place à trouver. Regagner la confiance des consommateurs, s’engager dans une démarche positive, prendre pleinement à cœur votre rôle de professionnel de l’alimentation… Car en France, 56% des consommateurs sont défiants à l’attention des grandes marques… mais 70% d’entre eux sont attentifs à leur engagement social, selon un rapport AT Kearney publié le 10 octobre (en savoir plus). Pour être crédible, et éviter que votre démarche ne soit pas assimilée à un simple « coup de com », il est indispensable d’associer des actions sociales réelles à votre discours.

Plusieurs mécènes (la BD est distribuée gratuitement), convaincus par cette démarche, ont d’ores et déjà rejoint le projet de Sopexa : Danone, Bel, General Mills, Coop de France, Nestlé, etc.  Ce qui les motive ? « Donner une réalité à un discours, concrétiser une politique de RSE, en distribuant par exemple la BD à leurs salariés », explique Armelle Dardaine-Leopoli. « Ils se sont vraiment prêtés au jeu, en acceptant la BD telle que nous l’avons réalisée. Ni le texte, ni les visuels, ni même la moindre virgule n’ont été changés », précise-t-elle. Le projet est porté par la Fondation pour l’Innovation et la Transmission du Goût. « Nous lançons d’ailleurs un appel aux industriels et structures qui souhaiteraient, à travers le mécénat, nous aider à diffuser la BD gratuitement à tous les enfants de CM2 de France » ajoute-t-elle.

En revanche, une collaboration scientifique avec le CSGA de Dijon a permis à Sopexa de valider le contenu des messages. « Il était essentiel que les textes soient approuvés par des experts de l’alimentation des enfants. »

Une démarche originale, qui permet de se poser la question du rôle à jouer, toute en discrétion, par les professionnels de l’agroalimentaire, sur l’éducation nutritionnelle infantile.

2 commentaires

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Clémence

30 octobre 2017 à 09h26

Bonjour GrosCorpsSocial, La discrimination envers les personnes en surpoids, et notamment les enfants, est évidemment un problème auquel nous sommes sensibles. Cette illustration vient de la BD dont nous parlons, mais nous n'avons pas pris part à sa conception. La démarche nous semblait intéressante : il s'agit d'une première, et des points d'amélioration sont certainement à apporter. Pour en discuter, je vous invite à contacter les auteurs. Clémence de Vitagora

GrosCorpsSocial

28 octobre 2017 à 11h09

Bonjour, Personne ne s'est dit que mettre une écharpe en saucisses au seul enfant gros de la couverture posait un problème ? Que cela entretenait la grossophobie qui pousse à les stigmatiser voire les harceler à l'école, dans leur propre famille ? Selon le Pr.Basdevant, coordinateur du plan obésité 2010-2013, la discrimination vis à vis des enfants obèses était devenu le 1er facteur de discrimination à l'école. Tant de choses à écrire sur le sujet mais grande déception.

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