13 août 2018
Consommer mieux et moins : la tendance à la frugalité ?
Dans les achats alimentaires, le prix constitue l’un des critères principaux (lire ici). Un Français dépense en moyenne 3 600€ par an pour son alimentation (à domicile, restauration hors domicile, et boissons) (source : Insee, enquête budget de famille, Agreste Memento 2015), ce qui représente 23 % de son budget contre 35% en 1960. Sollicités sur tous les fronts de consommation (habillement, loisirs, équipement téléphonique et informatique…), et cibles constantes des comparateurs de prix, les consommateurs mettent en place des stratégies pour dépenser moins. Ce qui ne veut pas dire dépenser moins bien : de plus en plus, frugalité se met à rimer avec qualité. Parfois même, il s’agit d’un choix très conscient des consommateurs. Un comportement à comprendre par les industriels de l’agroalimentaire, car il recèle d’opportunités de marché.
La frugalité : effet ricochet de la crise
Dans les fiches « tendances et impacts » publiées par le ministère de l'Agriculture, de l'Agroalimentaire et de la Forêt, l’ANIA, la CGAD, la CGI, Coop de France, la FCD et FranceAgriMer (ien), le « consommateur stratège » fait l’objet d’une analyse dédiée. Derrière cette expression se cachent des consommateurs qui, bien souvent pour des raisons de restriction budgétaire, sont à la recherche des « meilleurs prix » pour leurs achats alimentaires. Selon le CREDOC, l’année 2013, juste à la sortie de la « Grande récession » de 2008 à 2012, est marquée par l’avènement de la frugalité : dans le rapport « En marge de la crise: émergence d’une frugalité choisie », le CREDOC estimait que 62% des Français avaient mis en place des stratégies de frugalité. Parmi ceux-ci : 12% de stratèges (achats en ligne…), 22% d’économes (adeptes des comparateurs de prix qui passe à l'autopsie chaque bon de réduction), et 14% de contraints. Mais également, 14% de « frugalité choisie ». Depuis 2013, la frugalité fait son chemin : en octobre 2016, XTC, cabinet spécialisé dans le conseil en innovation aux industries agroalimentaires, mentionnait la « frugalité positive » et le « mieux avec moins » comme des signaux faibles en pleine croissance (source). Selon l’OBSOCO, 37% des Français auraient « réduit les quantités ingérées au cours des dernières années pour se tourner vers une alimentation plus frugale ».
La frugalité choisie
Dans les comportements frugaux, il convient de distinguer deux typologies de consommateurs : ceux qui sont contraints à la frugalité pour des raisons économiques, et ceux qui choisissent de réduire leur consommation et leurs achats alimentaires pour des raisons individuelles – qu’elles soient d’ordre économique, écologique, santé, etc. - alors qu’ils n’éprouvent pas de contraintes financières.
Selon le CREDOC, 14% des consommateurs français sont des consommateurs engagés vers une « frugalité choisie » (source). Cette démarche s’inscrit dans une conscience globale de responsabilisation des consommateurs-citoyens, en réaction à la surconsommation, au même titre que les démarches anti-gaspi ou « zéro déchets » : il s’agit de réduire son empreinte environnementale, de limiter le superflu, parfois même de privilégier des achats ramenant du lien social (VS des achats anonymes de masse) ou à fort impact économique (commerce équitable, etc.).
En conséquence, ces consommateurs dépensent moins – mais de façon plus ciblée, et sur des produits à plus haute valeur ajoutée.
Quelles opportunités ?
De nombreuses opportunités se cachent derrière la frugalité, qu’elles soient en termes de produits, de services, de positionnement de marque, ou même de circuits de distribution. Quelques exemples :
Côté produits, la frugalité choisie va de pair avec la priorité donnée aux aliments de qualité – peut-être un peu plus cher, mais en moins grosse quantité. Des aliments peu transformés, de type clean label (lire également notre article ici sur le clean label), bons à la santé. Dans cette démarche, on retrouve les opportunités liées au « flexitarisme », avec des consommateurs cherchant à réduire (sans supprimer de manière catégorique) leur consommation de viande, en privilégiant une viande de meilleure qualité, locale ou d’origine fermière, et présentant notamment moins d’impact pour l’environnement.
Du côté du positionnement de marques et des services apportés aux clients, le groupe SEB valorise son engagement contre l’obsolescence programmée, et tournée vers la « réparabilité » de ses produits grâce à un stock de 6 millions de pièces détachées situé en Franche-Comté et à l’usage de l’impression 3D pour produire des pièces rares à la demande (en savoir plus ici).
Enfin, une dernière opportunité de développement se trouve dans les circuits de distribution « anti-gaspi », avec notamment les boutiques de vente en vrac. S’adressant à la communauté des « zéros déchets », ce concept de vente de produits au détail et sans emballage sort progressivement d’une présence anecdotique pour se faire une vraie place dans le paysage de la distribution : modèles de franchises, chaines, boutiques indépendantes, et de plus en plus, espaces dédiés dans les surfaces de la grande distribution, etc. Selon l’association professionnelle Réseau Vrac, la France se situe même comme leader sur le marché du vrac (source). « Une niche qui progresse rapidement », expliquait David Sutrat, cofondateur de la chaine Day by Day à LSA (lire l’article sur LSA). S’il s’agit bien d’un marché grandissant (chiffre d’affaires multiplié par 5 en 4 ans, passant de 100 à 500 millions d’€ en 2017 – source), cela reste un marché avec des contraintes propres (absence de visibilité des marques, freins réglementaires et techniques…) qui nécessitent de repenser sa production de manière globale (portions, conditionnements, etc.).
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Satin
19 août 2018 à 07h19
Clémence PARIS
17 août 2018 à 09h22
HESS
17 août 2018 à 09h18